Il y a une fraternité du vin, fusionnelle, joyeuse, vite bruyante, parfois incontrôlable. Il y a un esprit du vin, volatil et prenant.
Dans le thé aussi, il y a un principe, mais d'éveil, d'attention, de tension. Le thé est associé à la méditation, on boit du thé pour ne pas s'endormir. Des légendes associent la découverte du thé à l'Eveil avec majuscule (cf. les paupières de Boddhidarma).
Le vin, dans la Bible, est associé aux excès de Noé (ses filles doivent le recouvrir d'un manteau pour protéger la pudeur). Le vin fait sortir de soi, il lève les inhibitions. Dans un groupe qui se constitue pour une soirée quelconque, le vin, les boissons alcoolisées ont un rôle facilitateur. Il suffit de voir comment « l'ambiance monte » en fonction du temps qui passe, lui-même simple indicateur du taux d'alcoolémie.
Le thé est aussi associé au jeu. J'imagine, faute de les avoir connues, des maisons de thé asiatiques où l'on joue fort avant dans la nuit au mah jong, aux dés, dans la tension stratégique et la présence à soi.
Le vin est oublieux de soi. Il enivre.
Le thé renvoie à soi. Il éveille.
Ces différences sont dans le produit lui-même, et dans l'usage qu'on en fait.
La secte des Hachinchins utilisait la pâte de cannabis pour déclencher la pulsion du meurtre et en entretenir le goût. Certains de nos contemporains l'utilisent pour se découvrir cool, pour planer, raides défe. On dit qu'une toxicomanie, c'est la rencontre entre un produit et une personnalité, dans un contexte donné. Elle n'est pas dans le produit seul.
L'alcool, le THC modifient les perceptions. Ils transforment, non pas le monde, mais l'appréhension du monde. La théine, elle, aiguise les perceptions, permet à la lucidité de s'exercer.
Alors, l'esprit du thé ? La rencontre entre un produit qui augmente certaines perceptions sans en modifier la nature, une personnalité en recherche, dans un contexte, par exemple ce Cercle : oui, parfois, l'esprit est là.
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