26 juin 2005

Intériori-thé


(...) une émission de radio d'il y a bien dix ou quinze ans : quelqu'un rapprochait un vin d'un tableau et d'un fromage. Il allait dans un musée déguster un pouilly montrachet avec un bleu de Bresse, peut-être, devant, disons, la chambre de Vincent à Arles et il cherchait les « correspondances » subtiles qui pouvaient unir ce que lui proposaient ses sens. Correspondances de la palette, évocation des espaces offerts par le vin confrontés au contraste de cette chambre close, sans lumière extérieure et pourtant tellement lumineuse, tout entière éclairée par l'âme de celui qui l'habite…
Quel thé déguster devant la Chambre d'Arles ? Quel thé aurait suffisamment d'intériorité pour communiquer une telle lumière intérieure ?

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Cette chambre est composée de strates de couleurs, telle un jardin de thé. Le parquet, le lit, la table et les chaises ont reçu de la palette de Van Gogh un marron-jaune pareil à la terre où sont solidement enracinés les théiers. Deux tâches vertes portées par les chaises pourraient figurer deux Camelia sinensis. La partie supérieure du tableau, dernière strate de cet écosystème, est logiquement bleue, ciel infini percé d’un soleil rayonnant que l’on sent vouloir jaillir par l’unique fenêtre. A l’image de cette chambre simple, les éléments essentiels sont là pour donner vie à cette plante merveilleuse venue de Chine. Toutes les couleurs du thé sont présentes dans ce tableau. Le blanc de la serviette suspendue et des oreillers, le jaune et le vert des chaises, le bleu-vert des murs et des vitres, le rouge de la couverture, enfin le noir des montants de la fenêtre. Cette chambre pourrait donc accueillir toutes les familles du thé. Mais il en est un que cet intérieur appelle tout particulièrement. Un thé qui nous accueille à bras ouverts, comme le fait cette chambre grâce à la construction géométrique imaginée par Van Gogh : le spectateur a les pieds sur le parquet, le lit est à portée de main, deux pas suffisent pour ouvrir la fenêtre et inonder la pièce de soleil et de chaleur. Un thé-compagnon, dans les bras de qui on se blottit volontiers pour se réchauffer le corps et le cœur, comme parviennent à nous réchauffer les couleurs du tableau, rouge, jaune…Un thé qui nous met à l’abri du monde, qui nous rassure, à l’image de l’intérieur confortable et douillet qu’offre cette chambre, à l’image aussi des portraits affichés au mur, que l’on imagine être ceux de Vincent et de son frère Théo, qui insufflent à ce tableau une ambiance familiale, famille refuge et protectrice. Le thé ainsi décrit en écho à ce tableau de Vincent Van Gogh, pour moi s’appelle Qi Hong, thé rouge de la province chinoise de l’Anhui. Sa liqueur brune aux reflets rouges, ses notes animales et chocolatées, le bienfait que me procure chacune de nos rencontres, font de ce Qi Hong le thé que j’aimerais déguster tranquillement assis à cette petite table de « La chambre de Vincent à Arles ».