30 octobre 2016

Aucun signe d'inquiétude

À Taiwan 🇹🇼, les jeunes femmes s'habillent court, très court. Ça ne leur vaut aucune remarque déplacée. Vous en croisez une à 11 h du soir, seule, dans un endroit plutôt désert, elle ne manifeste aucun signe d'inquiétude. Vous avez besoin de lui parler, parce que vous êtes perdu, et en réalité c'est vous qui êtes inquiet, elle vous répond spontanément, sans crainte. Elle cherche à vous aider mais décidément la barrière de la langue est infranchissable. Elle vous rassure d'un geste, sort son téléphone. Quelques minutes après, un jeune homme parlant anglais arrive, il vous accompagnera. C'est extraordinaire comme le monde peut être civilisé parfois. La civilisation suppose des codes : on reste à distance, on salue en inclinant la tête. Pas de contact physique. On ne se jette pas sur les gens qu'on ne connaît pas pour les embrasser, ni même sur ceux qu'on connaît. Ce serait choquant. On se salue avec le sourire, à deux pas, le poing d'une main dans la paume de l'autre, inclinaison de la tête et du buste plus ou moins profondes selon les circonstances. Les femmes se sentent en sécurité. Et l'homme que je suis n'en est que plus heureux, parce que pouvoir parler avec les gens, sans que la moitié du monde ait envers vous a priori un sentiment d'appréhension, une méfiance, voire une crainte, est une tellement meilleure manière de vivre. Dans la rue, on se croise sans se regarder, par discrétion, ça ne concerne pas les femmes vis à vis des hommes ni les hommes vis à vis des femmes, mais tout le monde vis à vis de tout le monde. Si quelqu'un mérite un regard d'étonnement, ce sont ces étrangers tellement grands, mais le regard sera discret, imperceptible. Et s'il arrive qu'on le croise, il se transforme en sourire.
Frances demande à Ho Hsin : Pourquoi les femmes ont-elles des vêtements qui leur couvrent les épaules ? Dans la rue, je suis la seule aux épaules nues, avec mon t-shirt à bretelles. C'est une question de pudeur ? Je devrais m'habiller autrement ?
— Oh non, on est en octobre, il commence à faire frais !
C'était vendredi : 34ºC tout de même ! Mais il est vrai qu'en soirée ça allait descendre à 26-28 :).
Mélanie le confirme : Bretonne installée depuis cinq ans à Taipei, étudiante en cinéma et journaliste à la radio, sinophone, elle s'habille comme elle veut et ne souffre pas de regards ou de propos malveillants. Parfois, c'est vrai, de loin en loin, le regard d'un vieillard concupiscent sur ses belles jambes, mais ça n'a pas plus d'importance que ça. C'est visiblement le fait de gens peu éduqués. C'est au cours de ses rares séjours en France que ça se complique quand elle entend son frère lui dire : Tu ne vas quand même pas sortir habillée comme ça !
A l'occasion, il faudra tout de même checker ce que veut dire liberté dans Liberté, Égalité, Fraternité. Parce que là, on est franchement en retard et même en régression accélérée.

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